Juste un petit rappel : ceci n’est pas une traduction complète du livre « Explain Pain », mais un résumé de lecture. Il est recommandé d’en faire la lecture complète, évidemment.
La transmission des messages
Un nombre critique de capteurs « ouverts » va amorcer la propagation du message
Les neurones répondent aux stimulations électriques. À chaque fois qu’un capteur s’ouvre et que des ions positifs y entrent, le neurone devient de plus en plus excité. Lorsque plusieurs capteurs s’ouvrent et que le niveau de stimulation devient critique, un influx nerveux très rapide passe dans le neurone. Cette stimulation électrique est le message ; on l’appelle le potentiel d’action. Les nerfs transmettent les messages grâce aux potentiels d’action et un potentiel d’action est un message unique.
Un neurone doit atteindre son « seuil » d’activation pour transmettre le message. Si plusieurs capteurs sont ouverts, mais qu’il est encore sous le seuil d’activation, rien ne se passe. Dans un tel cas, un seul petit mouvement ou changement de température peut ouvrir d’autres capteurs et alors le message est transmis. Si ce neurone est spécialisé dans la transmission des messages de danger, un seul petit stimuli pourra l’emmener à son seuil d’activation et il transmettra son message de danger.
N’oublions pas que le seul message qui est transmis est « danger » et non pas « douleur ». La moelle épinière et le cerveau qui recevront l’information vont l’analyser et lui donner une signification particulière qui peut ou non inclure de la douleur.
Le message d’alarme atteint la moelle épinière
Lorsque le message arrive au bout du neurone, dans la moelle épinière, des substances chimiques sont relâchées entre ce neurone et les neurones qui prendront le relais du message. C’est ce qu’on appelle une synapse.
Les synapses sont les espaces entre le bout d’un neurone et le début de l’autre.
Plusieurs neurones peuvent converger vers un seul neurone dans le cerveau. Un neurone pourrait provenir du pied, l’autre du genou).
Il existe des neurones qui partent du cerveau et qui vont « bloquer » l’information au niveau de la synapse. Ainsi, le message de danger ne peut plus aller plus loin.
Chaque neurone qui transporte des messages de différents tissus aura des substances chimiques différentes. Disons que nous avons les substances A, B, C, et D.
Les neurones qui prennent le relais et qui vont vers le cerveau possèdent des « ports » où peuvent s’attacher les différentes substances chimiques. Il faut que ce deuxième neurone ait un « port A » pour que la substance A provenant du premier neurone puisse ouvrir le capteur du deuxième et y passer. Et ainsi de suite. Ils répondent donc à certaines substances, mais non à d’autres.
Les capteurs des neurones qui se rendent au cerveau
Certains des capteurs de neurones de deuxième ordre sont à l’affût des informations quotidiennes, à mesure qu’elles arrivent. D’autres sont des capteurs qui possèdent une « mémoire ». D’autres sont des capteurs qui vont renforcer le message. Et finalement, d’autres seront renforcés par l’activation du système immunitaire. Par exemple, en cas de grippe, lorsque l’intégrité du corps est compromise, il est fréquent de développer plus de sensibilité.
Un exemple : si la substance qui est transmise par le premier neurone est A, et que le neurone possède un « port A », le capteur s’ouvrira. Il faut toutefois attendre que le niveau d’excitation de ce deuxième neurone atteigne le seuil d’activation du neurone, son niveau critique, puis le message sera envoyé très rapidement au cerveau. On appelle ces neurones les neurones nocicepteurs de second ordre.
Le tri au niveau des synapses
Les synapses dans la moelle épinière sont un peu comme un bureau de poste régional, où une grande quantité de messages peuvent être distribués. Cette activité régionale est sous le contrôle du cerveau, le bureau de poste central. En fait, le bureau de poste régional (la moelle épinière) peut être complètement fermé par le bureau de poste central (le cerveau) grâce à un métasystème très puissant de gestion du système d’alarme.
La pharmacie dans le cerveau
De quelle façon cela se produit-il ? Une voie descendante qui provient du cerveau transporte des substances chimiques plus fortes que n’importe quel drogue ou médicament que vous pourriez ingérer ou vous faire injecter. Cette voie permet la distribution d’hormones « joyeuses », comme des opioïdes, de la sérotonine et de la morphine qui ont tous des formes différentes, donc qui stimulent des capteurs différents. Ces capteurs vont donc laisser sortir du neurone les ions chargés positivement, ce qui le rendra moins excité, donc moins apte à transmettre son message. Ainsi, les influx nerveux descendants réduisent l’intensité du signal d’alarme.
C’est grâce à ce système que vous pouvez gagner les olympiques, le championnat mondial ou cuisiner pour 20 personnes, alors que vous êtes blessé. La meilleure façon d’en profiter au maximum est de mieux le comprendre.
Le cerveau va traiter le message, en même temps que plusieurs autres
Si le signal de danger passe la synapse, il va se rendre au cerveau où il sera traité en même temps que plusieurs autres signaux. Le défi du cerveau est de construire une histoire, la plus plausible possible, basée sur l’information qui arrive et toutes celles qui sont déjà en mémoire. On peut penser à la douleur comme étant une partie de la réponse du cerveau à l’information qui lui est parvenue. D’autres réponses seront, par exemple, changer de position, transpirer, parler, etc.)
Ce qu’on apprend des expériences scientifiques qui ont pris part dans les dix dernières années c’est que des centaines de parties du cerveau seront stimulées simultanément lors d’un événement douloureux. Quoiqu’il existe un modèle régulier, les parties du cerveau qui sont impliquées et l’intensité de l’activité seront différentes pour chacun. Chaque douleur est une expérience unique.
Il n’existe pas « un centre de la douleur ». Plusieurs zones du cerveau peuvent être impliquées. Ce sont des « noyaux d’ignition ».
Dans le cerveau, nous trouvons différents noyaux qui servent à la sensation, au mouvement, aux émotions et à la mémoire. La douleur utilise ces noyaux pour s’exprimer. Lors de douleurs chroniques, ils peuvent devenir très sensibles et c’est comme s’ils étaient pris en otage; ils sont alors utilisés comme des « neurosignatures » de la douleur (pain neurotag).
Dans le cerveau, plusieurs noyaux seront activés lors de la douleur. Chacun de ces noyaux est relié aux autres et crée un réseau, un peu comme l’image des destinations entre villes dans les magazines des compagnies aériennes ; ce réseau est une neurosignature. Cette notion a été expliquée en premier lieu par Melzack lorsqu’il a décrit la neuromatrice.
Rappelons-nous que le message de danger n’est qu’un message parmi plusieurs qui se rend au cerveau ; il n’est pas suffisant pour créer de la douleur. Un exemple : un membre fantôme douloureux à l’air frais. Même si le membre n’y est plus, la même zone du cerveau montre de l’activité autant que s’il y était.
L’orchestre dans le cerveau
Pensez au cerveau comme à un orchestre qui peut jouer des milliers de mélodies, changer le rythme, en faire de nouvelles, refaire les anciennes, etc. La douleur peut être perçue comme une mélodie jouée par l’orchestre cérébral.
Un bon orchestre peut changer facilement de mélodie. Mais si une mélodie est répétée sans cesse, qu’elle devienne automatique, cela devient de plus en plus difficile de changer de mélodie. La créativité se perd. Cet orchestre est notre cerveau qui physiquement a ces caractéristiques :
il est mou comme un jaune d’oeuf mollet
il contient environ 100 millions de neurones qui peuvent chacun faire des milliers de connexions
il y a plus de connexions possibles dans le cerveau que de particules dans l’univers
un neurone va s’allonger de 30% de sa longueur pour trouver un autre neurone (dans un bain de solution saline)
les bébés font des millions de synapses par seconde
3 millions de synapses couvent la superficie d’une tête d’aiguille
vous pourriez donner 10,000 synapses à chaque homme, femme et enfant de la planète et toujours fonctionner relativement bien
chaque synapse est entourée d’une cellule immunitaire qui peut l’influencer, ainsi que 100,000 synapses environnantes
Alors, même si la douleur fait partie de votre vie, elle n’est qu’une partie de l’immense répertoire de l’orchestre !
Il existe plusieurs systèmes pour vous sortir du trouble
Le cerveau fait un jugement de valeur sur ce qu’il reçoit, et il répond. Si vous êtes en danger, le cerveau peut faire intervenir différents systèmes pour vous protéger : par exemple, les muscles qui vont vous permettre de vous enfuir et la réaction sympathique qui aidera à la distribution du sang. D’autres systèmes existent : les systèmes immunitaire et endocrinien qui travaillent en silence, mais avec attention. La douleur sera souvent associée avec le dysfonctionnement d’un de ces systèmes. Mais en cas de danger pour la vie, tous ces systèmes vont vraiment travailler fort, de concert. Ils sont surtout efficaces pour de courtes périodes, tel un sprinter lors d’une course de 100 m. Cependant, si la douleur dure trop longtemps, la prolongation de l’activité de ces systèmes peut causer des problèmes. Ils ne sont pas destinés à faire des marathons.